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9 mai 2009 6 09 /05 /mai /2009 06:09
Le journal du collège "Jolimont's cool !" crée en 2008-2009 dans un club journal a eu cette année 2009, des difficultés à se mettre en place. Il est certainement normal que toute action, tout projet connaisse des ralentissements propices à de nouvelles avancées. Je tiens mon "carnet de bord" de ce projet et je décide aujourd'hui d'en faire profiter d'autres personnes qui seraient intéressées par cette action pédagogique.
Je rappelle que le journal papier a son blog  personnel comme tout journal dans la réalité a son blog ou son site. On peut le lire et poster des commentaires à cette adresse.


Voici un premier texte datant de l'année 2008 qui tente de relater l'expérience de lancement du journal. J'y fus très maladroite autant que les élèves mais nous avons réussi en fin d'année à faire émerger ce qui est devenu le journal du collège.


Un projet qui se cherche encore pour l’année prochaine…

   Je viens d’arriver dans mon collège à la rentrée, et ce journal qui vient de sortir, est le premier.
J’ai proposé la réalisation d’un journal du collège dans un club entre midi trente et treize heures trente parce que pour moi, prof documentaliste au CDI, c’est le seul moment où je peux avoir des élèves de tous niveaux, volontaires, qui travaillent ensemble. Je recherche en effet l’hétérogénéité que je ne rencontre que rarement dans les groupes classes qui travaillent avec moi, en demi classe, (cette année, les sixièmes et une cinquième). Cela dit, dans une classe, l’hétérogénéité existe, tous les élèves ne sont pas semblables.
Le club journal fait partie de mon travail de prof doc, du moins je considère que je peux y réaliser mes missions : former à l’utilisation des Tic, à l’outil mais surtout à l’utilisation consciente et responsable d’Internet, faire écrire, faire lire, mettre les élèves en situation d’autonomie et d’initiative.

Fin octobre : le lancement du projet
   Résumons. Je lance ce club en octobre, vingt-sept élèves de tous niveaux se présentent avec des représentations d’un journal, du but à atteindre assez flous mais en même temps, assez communs : on veut vendre d’abord, à des prix exorbitants (époque oblige, les ados ne sont que des tambours résonnants de la société ambiante). À qui ? On l’ignore, le collège, les copains, le quartier, sans se demander quelle est l’attente de ce lectorat. Si, tout le monde s’accorde sur « le people » ! Tiens, encore l’air du temps et le reflet de ce qui est lu à la maison et n’est pas lu au CDI au point que je me demande souvent à quoi bon s’abonner à tant de périodiques pour qu’ils ne soient lus que par certains qui de toutes façons, sont des lecteurs. Alors n’acheter que du « people » pour gagner des lecteurs ? Ou faire réaliser un autre journal que ceux qu’ils connaissent mais qui serait le leur ?

Donc traitement d’urgence, après vote pour élire un comité de rédaction et une rédactrice d’une classe de troisième : mettre les élèves en état de déconstruire leurs représentations de ce qu’est un journal. Car pour eux, il ne se passe rien non plus, au collège, il ne se passe rien dans le quartier… Ils veulent donc mimer la presse jeune qu’ils connaissent, où prédominent photos d’artistes, chanteurs éphémères mais auxquels ils s’identifient, avec bien sûr peu de texte à lire car ce n’est pas le but. Avec l’aide d’une maman d’élève et d’une personne en CAE (Contrat d’aide pour l’emploi), j’organise trois groupes avec distribution de presse ados et presse adulte et un questionnaire précis. On découvre alors des territoires inconnus, des rubriques qui interrogent sur le monde, la France, l’actualité, mais aussi la vie d’ados, etc. Chacun, ou en groupe de deux, se choisit un sujet à traiter. Nous n’avons qu’une heure à chaque fois, il est bien difficile d’aller faire des enquêtes, bien qu’un élève de troisième se soit proposé pour aller sur la place du Capitole photographier et interviewer les sans-logis qui campent. Mais il abandonnera à cause de la préparation anxiogène du brevet qui débauchera peu à peu une grande partie de ces troisièmes, même la rédactrice en chef.

Des débuts chaotiques
    Mais chacun a enfin son sujet, enfin je veux y croire, nous allons sur les ordis car ils en rêvent tous. A partir de là, c’est la débauche « Internet », la frénésie du copier coller qui va l’emporter malgré mes recommandations : un journaliste qui fait son article va sur le terrain, ne fait pas de copier coller mais enquête et donne son point de vue. Mais comme on me déclare sans arrêts qu’il ne se passe rien dans ce collège ni dans ce quartier, et qu’il est assez difficile d’aller voir ailleurs… Je laisse faire…
    Parallèlement, je crée un blog pour accompagner le projet. Il sert à recevoir les brouillons que l’on peut envoyer de chez soi, d’articles qui ne passent pas directement sur Internet puisque le blog est modéré. Mais il y en aura peu. Il est très difficile de mobiliser l’ensemble des élèves du collège malgré l’affichage réalisé par une élève dans le hall.
Mes remarques sur le copier coller, sur le droit d’auteur (car on recopie sans vergogne des textes ou des images sur le moteur Google, sans mentionner l’auteur) me permettent de remettre les pendules à l’heure du B2i.

Il faudra que les élèves comprennent ce qu’est un auteur (individuel ou collectif) pour qu’ils admettent qu’il faut qu’ils respectent les écrits des autres et qu'ils apprennent à citer leurs sources.
Fin décembre, je décide avant les vacances de faire imprimer tout ce qui a été produit : je me retrouve donc avec un amoncellement de copier coller. En janvier, nous analysons, chacun reprenant la page du copain pour une « réécriture » qui en restera au niveau de la « correction des fautes d’orthographe ». Encore une représentation à dynamiter : l’orthographe est importante certes, mais elle ne vient qu’à la fin et elle ne doit pas bloquer l’écriture. Ce blocage, je l’ai remarqué chaque fois que j’ai demandé à des élèves de sixième un travail en atelier d’écriture. Ils n’ont accepté d’écrire qu’avec l’assurance que je ne ferai pas attention à l’orthographe qui serait corrigée et non notée en fin de travail. Un vrai soulagement ! Je pose à nouveau la question : « mais il ne se passe vraiment rien dans ce collège ? - Non… »

Le journal est arrêté
   Je décide fin janvier d’arrêter le journal papier pour laisser décanter… Plusieurs élèves démissionnent alors, partent avec leur « copie » certains avec véhémence ; un groupe plus restreint s’accroche, un débat s’installe. Ces élèves sont peu à peu rejoints volontairement et jusqu’à la fin, par des élèves en difficulté en lecture-écriture d’une classe de cinquième avec qui je travaille maintenant. On accepte finalement d’écrire sans utiliser systématiquement Internet.
   Une élève de cette cinquième très en difficulté, que je dois aider, et qui parvient à écrire, décide de relater la visite d’un auteur-photographe dont sa classe étudie le roman. Celui-ci a exposé sur l’Algérie pendant deux mois au CDI. Qu’est-ce qui a bien pu faire que cette élève exclue très souvent des cours, pas facile, et aux résultats scolaires peu brillants, devienne si assidue ?
   Les élèves acceptent enfin de voir qu’il se passe des choses dans ce collège. On accepte de réécrire des textes outrageusement recopiés sur Internet, mais il y a du découragement, ce n’est pas facile. On écrit un peu sur le blog. Des commentaires sont postés.

Des perspectives s'ouvrent...

   Février : j’apprends que des CM2 vont pour la première fois venir nous rendre visite au collège, le principal ayant pesé pour que la liaison très importante entre les deux niveaux, se réalise. Et c’est bientôt la Semaine de la Presse : une quantité impressionnante de journaux et magazines gratuits autant pour la jeunesse que pour les adultes doit nous être envoyée. Ils seront exposés au CDI. C’est l’occasion rêvée pour présenter aux élèves une suite du projet. Nous allons limiter nos ambitions et présenter un journal « Spécial CM2 » avec un but précis cette fois : accueillir les futurs sixièmes et nous interroger sur « comment leur donner envie de venir dans notre collège» à l’heure où celui-ci perd ses effectifs, ses profs, a mauvaise réputation.

   Je suis étonnée de rencontrer enfin des élèves plein de sérieux, qui comprennent certainement qu’il y a enfin un enjeu dont ils seront responsables. De leur travail d’écriture, et dans un temps limité, viendra la réussite ou non. Alors, on décide d’aller faire des interviews dans le collège, pour parler des clubs, de ce qui s’y passe. Même des sixièmes qui ont entendu parler du projet, se lancent dans l’aventure. Ils demandent à partir en reportage pendant des heures de permanence qu’ils viennent « perdre » au CDI car ils n’ont souvent aucun projet de travail ou de lecture à ce moment-là. Ils partent interroger tout le personnel qu’ils semblent d’ailleurs découvrir, en tout cas sous un autre angle pour certains. Bien sûr, dans le journal, ne seront pas reproduits tous les renseignements qu’ils ont récoltés, des dates de naissance, des années d’étude. Des personnels de service se mettent à raconter leur vie. Des sixièmes sont allés interviewer une assistante d’éducation et je ne sais toujours pas qui a réécrit les notes rapportées pour en faire le texte cohérent que nous avons publié. Mais l’assistante d’éducation m’a dit par la suite que les sixièmes étaient tout étonnés qu’elle ait des diplômes et qu’elle ait fait autant d’études, ne la connaissant que comme la surveillante de la cour et des permanences.
  Soudain, ces élèves qui pour beaucoup participent à plusieurs clubs, découvrent qu’ils n’avaient jamais pensé à écrire dessus. C’est pourtant la vie du collège…

Des buts ont été atteints

   Alors, bien sûr, ce numéro 0 qui va finalement sortir au mois de mai 2008, me semble atteindre certains buts :
   Au début, il manquait l’identification du lectorat : à qui s’adresser et pour dire quoi ? Dans la réécriture du projet qui m’a permis à moi aussi de dépasser mes erreurs, les lecteurs sont bien identifiés, notre projet sur eux aussi.
Les élèves ont dû se questionner par rapport à des habitudes peu productives comme le copier coller, qui est une plaie à l’heure actuelle quand en plus, l’on ne donne pas les sources des informations.  Les élèves ne peuvent comprendre facilement surtout en collège, qu’il s’agit d’un vol, non des idées d’autrui (après tout, les idées doivent circuler et quand on travaille en groupe, on partage les idées), mais de son écriture, de la manière dont lui, personnellement, les a pensées. Il me semble que c’est en se situant réellement comme auteur, en pensant la situation de l’intérieur que ce concept peut être construit. Sinon, cette demande de citer ses sources, de ne pas faire du copier coller, risque de rester de l’ordre de l’interdiction extérieure, demandée par le prof.
-    La distance : j’ai voulu réaliser le journal avec les élèves. J’ai écrit l’éditorial, mais la prochaine fois,  ce pourra être l’un d’entre eux. Je me suis chargée de la mise en page informatique tout en les intégrant à la conception de la maquette d’un point de vue « intellectuel » : quelles rubriques allions-nous mettre et comment ? Il m’est arrivé de corriger des expressions au moment du bouclage du journal par respect à la fois des élèves auteurs et des lecteurs. Je n’ai pas vu cela comme une intrusion dans des écrits intouchables. Au contraire, ils permettront dans les séances de débriefing, de réfléchir dessus. Un journaliste localier est d’ailleurs invité pour ancrer ce projet dans la vie sociale .
-    L’éducation à l’image participe de la mise à distance. Des élèves ont fait les photos, c’est une forme d’écriture et de pensée sur le réel. Toujours à partir de notre objectif : nous voulions présenter le collège sous un aspect le plus agréable possible. Le groupe a analysé ensemble quatre photos que j’avais sélectionnées comme caractéristiques. Plus tard, cette sélection pourra être faite directement par les élèves, mais le manque de matériel et de temps a fait que j’ai réalisé cette opération chez moi. Des réflexions sur le cadrage, la présence ou non de certains éléments dans l’image ont amené à comprendre qu’une image, une photo n’est pas neutre et que l’on peut à la fois tenir un discours dessus mais aussi s’en servir comme une arme de persuasion et de propagande : les élèves ont choisi l’image du bâtiment vu d’un peu loin, avec du feuillage autour (on préserve la nature ici, - en plus il y a un projet « développement durable recyclage » dont personne n’a parlé,  je suppose, parce qu’il peine à se mettre en route et existe à peine - ), contre l’image cadrée de près où prédominait le béton et même la moisissure.
-    Comme tout journal, celui-ci contient des articles neutres, comptes rendus, mais aussi des textes d’élèves qui donnent leur point de vue : des articles que des élèves ont signés, où ils s’impliquent et s’adressent à un lecteur supposé les lire pour tenter de le convaincre. Les élèves de la classe d’accueil ENSA ont écrit des autobiographies qui les ont amenés à utiliser plusieurs supports, le crayon en classe et le clavier en salle informatique. On pourrait dire qu’ils étaient comme à l’école maternelle, car ils ont à apprendre le français et ils ont tous beaucoup aimé ce genre de travail. Pour eux, aussi, la situation d’écriture était claire depuis le mois de mars : ils écrivaient pour le journal. Leur prof de français leur avait bien expliqué qu’il ne s’agissait pas d’un exercice pour faire un exercice.

 Plusieurs élèves, de leur propre initiative,  ont pris contact avec les directeurs de leur ancienne école, sont allés demander le nombre de photocopies à fournir et se sont proposés pour aller les distribuer aux CM2. Ce sera un excellent moyen de liaison.
Juin 2008
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